Les démocraties canadiennes et américaines sont actuellement traversées par un débat très intéressant sur les conditions de performance de l'opposition. Cette dernière doit-elle mener un combat permanent d'affrontement avec la majorité en place ?
Progressivement, une ligne directrice semble se dégager : débattre des moyens et non pas des fins.
Ce sont les électeurs qui font la décision qui imposeraient ce choix stratégique. En effet, les élections se gagnent désormais par la mobilisation des indécis. Les indécis votent pour la résolution des problèmes. C'est leur façon de "vivre le marché politique". Ils attendent donc une offre de moyens davantage que de finalités. Sur les fins, ils n'aiment pas les controverses. Ces dernières ne les mobilisent pas. Ils sont d'abord consommateurs d'améliorations concrètes immédiates. Les débats de "projets de société" ne les concernent pas. Ils ont déjà été gagnés par les désillusions à répétition. Par conséquent, il ne s'agit plus de construire de grands affrontements mais de bâtir des solutions de moyens aux problèmes auxquels ils sont confrontés.
Dès 1985, j'avais lu une analyse de ce type en France (Esquisse d'une théorie de la délibération politique / Bernard Marin / Le Débat). Cet auteur a probablement conceptualisé très tôt la "théorie à la mode".
Sous cet angle, le débat politique n'est plus à l'affrontement à l'évitement. Il ne s'agit plus de chercher à installer des grandes controverses qui puissent structurer l'opinion mais, bien plus modestement, à éviter ces grandes controverses pour offrir des solutions concrètes sur des contenus acceptés comme cadre de la compétition.
Le Parti Libéral canadien a fait sienne cette nouvelle logique. Plusieurs responsables du Parti Républicain défendent actuellement cette analyse face à Obama. Il sera intéressant de suivre la politique Française pour voir les leaders qui s'approprient cette analyse. Explique-t-elle le score de Bayrou aux Européennes de juin 2009 ? Une nouvelle règle du jeu s'installe peut-être ?